Le temps. Ce 12 juillet, il est à la pluie. Elle
n'est pas l'élément le plus populaire des auto-pouceurs. Elle rafraîchit,
certes, mais elle fouette aussi le cuir facial. Et les cochers lui attribuent
des intentions menaçant l'atmosphère déjà confinée du "salon" de
leur charrette. Leur hospitalité en sera d'autant plus acceptée !
Aaaaaaaah, la solitude des auto-stoppeurs !
Une patience que je n'apprendrais jamais!! Jamais je
parviendrais à supporter ces attentes aux secondes de plomb, sous le soleil ou
dans la pluie ! Je ne comprends pas, j'ai tant attendu, et pourtant, je souffre
dans une attente prolongée.
Si le cadre est enchanteur, ou si on s'amuse, on tient une, voire deux heures. Un jour, à Rennes, Sonitchka eut l'idée de changer notre écriteau, de remplacer Paris par Tokyo. Nous avons ri pendant une demi-heure, observant comment les visages des automobilistes se tendaient en lisant, puis s'épanouissaient en sourire, ou ne s'épanouissaient pas du tout, butté dans leur réalité. Certains, mécontents, nous dirent qu'on exagéraient. Curieux ! Mais faire sourire ne nourrit pas. Ne rend pas plus solidaire non plus. Et nous avons tourner notre dos à cette route et à ses usagers incompréhensifs.
J'ai pris conscience peu à peu d'une vérité de l'auto-stop : ne prennent les piétons aux pouces levés que ceux qui le font d'habitude. En une seconde, il n'est pas possible de faire le bilan de son humeur: ai-je ou non envie de compagnie ? Oh, quelqu'un a besoin d'un "lift", vais-je lui venir en aide ? Non. On prend par réflexe. Réflexe solidaire, réflexe mondain, réflexe écologique. J'appelle les mondains ceux qui aiment rencontrer, et les écolos ceux qui remplissent leur voiture.
C'est ainsi que j'admire les gens qui restent des journées entière à
attendre. Vendeurs de rue, vigiles, et autres grands immobiles, comment
meublez-vous votre inaction ? Comment passe votre vie ? Une vie
contemplative, réflexive ou bien découvrez-vous des détails qui nous
échappent, à nous qui traversons la vie à grande allure ?